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 harmonie du soir • andrew

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MessageSujet: harmonie du soir • andrew   harmonie du soir • andrew EmptyMer 10 Juil - 14:04

andrew & ambroise
harmonie du soir


Ambroise avait posé les pieds à New-York depuis trois jours. Le devoir l'appellait auprès des mutants, auprès de ceux qui, loin de l'institut, vivaient encore dans la peur, camouflés dans la nuit et l'ordinaire. S'y trouvaient des êtres chers, qu'il traitait comme des diamants. Andrew, Andrew qui l'avait appelé, l'ivresse à la voix, Andrew, mutant puissant, qui éveillait la curiosité et la fierté chez Ambroise, Andrew faisait partie de ceux-là. Cher à son coeur, ravissement à son paternalisme. Il y voyait le reflet de certaines émotions qu'il avait autrefois incarné. Soupir aux lippes. Regard vers l'écran lumineux, qui éclaire la nuit comme un papillon bleuté. Tu es où ? Derniers mots d'un presque père, et le presqu'enfant, déjà grand, ivre et exalté, silencieux. Ambroise avait poussé jusqu'à Brooklyn, territoire du mutant. Ils se connaissaient assez pour y avoir sillonné quelques nocturnes. Il traque tranquillement, esquive les masses, ignore les êtres qui, comme Andrew, se révèle trop porté sur la bouteille, ce soir.

La chance brille, car dans son errance, il entend le timbre connu. Il vérifie, les yeux qui braquent la silhouette. Andrew est là, tout contre un mur, parlant seul, ou à des démons intérieurs. Ambroise chérit les cieux qu'il n'ait pas eu l'idée d'employer son don - à moins que ? « Andrew, tout va bien ? » qu'il interroge en s'approchant. Main sur l'épaule masculine, regard curieux, qui scrute les traits familiers. Andrew a toujours eu sa beauté pour lui, la sérénité de ses traits, l'ovale d'une machoire où un début de barbe y éclot comme puissance masculine. Mais ce sont ses yeux qu'Ambroise a toujours chérit. Des billes d'obsidienne, pures et sensuelles. Les prunelles bleues du blond les croisent, et un sourire éclot sur ses lèvres. Si proche qu'il est, l'ivresse a l'odeur d'un alcool bon marché.

« Allons bon, qu'est-ce qui a bien pu te pousser à boire ainsi, mon ami ? » tonne t-il calmement, faussement grondeur. Il a glissé un bras pour soutenir Andrew. La proximité du jeune homme ne l'ennuie pas. Il l'apprécie à la manière d'un enfant, plus encore que d'autres. Un préféré, voilà ce qu'il est. « Tu vas avoir besoin de décuver tout cela. On rentre chez toi ? » susurre t-il encore, voûté pour le maintenir à flot, tout contre lui. Noyé à la vodka, au whisky, tenant à une bouée blonde, à présent. Ambroise regrette de n'avoir pas été là ; il est réellement angoissé de voir là non pas la beuverie d'une jeunesse oublieuse, mais une décadence volontaire pour une raison profonde. « On a que quelques rues à faire. Un pas après l'autre, d'accord ? » encourage t-il le brun. Quelques quolibets montent alentour, des mots qui ne signifient rien, des inconnus qui s'imiscent et s'envolent.

Un coeur tendre, qui hait le néant vaste et noir,
Du passé lumineux recueille tout vestige!
Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige...
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Pando
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MessageSujet: Re: harmonie du soir • andrew   harmonie du soir • andrew EmptyJeu 11 Juil - 10:01

HARMONIE DU SOIR  


« Ambroise ! Ambroise ! » l’interpelait Andrew. Sa tête était légère, ses paupières lourdes, la soirée avait été longue. Il était sorti prendre l’air en attendant qu’on vienne à sa rescousse, et s’il avait voulu compter les minutes, il avait lamentablement échoué. Tout le monde n’avait pas le talent d’un mathématicien, et clairement pas Andrew, surtout dans cet état-là.

Mais son père était là. Son beau-père ? Son père de substitution, celui qui avait fait d’Andrew ce qu’il était aujourd’hui. Ambroise la force calme, l’objet inamovible, la valeur sûre. La seule constante dans ce monde trop rapide. Ses yeux bleus qui scrutent sans relâche et que rien ne pourrait effrayer, ses épaules larges qui pourraient porter tout le poids du monde, ses bras forts qui encerclent Andrew pour s’assurer qu’il tienne au moins debout.
« Je… Pfff… » commençait Andrew comme le début d’une réponse qui n’en était pas une. Pourquoi s’était-il infligé cela ? N’avait-il pas mieux à faire ? N’avaient-ils pas mieux à faire, sous les deux ? Ils auraient pu passer une bien meilleure soirée, si tout s’était passé comme prévu. Mais rien ne se passait jamais comme prévu, rien ne faisait ce qu’il fallait, sauf Ambroise qui avait toujours su être au bon endroit au bon moment. Merci.
« Oui oui, chez moi, chez moi. C’est par-là, vient. »

Andrew aurait eu bien du mal à marcher si Ambroise n’avait pas été là. Du coton dans les jambes et la tête dans les nuages, le sol se défilait sous chacun de ses pas. La rue était animée, la ville qui ne dort jamais avait toujours mérité son nom, au grand dam de ceux qui avaient besoin d’une bonne nuit de sommeil. Les lampadaires clignotaient et les autres fêtards n’étaient pas nécessairement dans un meilleur état qu’Andrew. Mais eux étaient accompagnés, pour de vrai. Ils n’avaient pas eu à crier à l’aide pour que quelqu’un veille sur eux. Ils tenaient quelqu’un par le bras, par la main, ou ils marchaient timidement sans oser se toucher, mais personne n’était seul. Andrew n’était pas seul, lui non plus, il avait Ambroise, mais il voyait le monde à travers les lentilles alcoolisées des hommes déçus, abandonnés.
« Merci d’être venu m’chercher… » commençait Andrew. Il poussa un soupir, puis un « Désolé… » Andrew qui avait toujours voulu être celui qui sait prendre soin de lui, celui qui est autonome et l’exemple de sagesse et de stabilité sur qui l’on peut compter sans se poser de questions, quelque chose en lui se brisait un petit peu plus à chaque fois qu’il se rendait compte qu’il n’était pas Ambroise.
Il devait être triste à voir, se disait-il. Vivement qu’il soit chez lui, qu’il puisse s’allonger, pousser un dernier soupir et sombrer pour quelques heures jusqu’à ce que le jour se lève à nouveau. Et demain, il remercierait Ambroise comme il se doit, se promettait-il silencieusement. Un beau cadeau, un beau resto, n’importe quoi pourvu qu’il se rachète et que l’on oublie cette soirée-là.

« Vient par-là c’est plus rapide, vient, vient » érupta Andrew à la vue d’un raccourci vers la maison. Ils n’étaient qu’à quelques pâtés de maisons, mais pour quelqu’un qui titubait comme Andrew, chaque mètre comptait. « J’te jure c’est par-là ! » insistait-il avec toute la force que lui laissait son état, tirant Ambroise derrière lui par le bras qui l’encerclait dans cette ruelle serrée entre deux immeubles. Ce passage n’était que poubelles, ordures et créatures qui grouillaient dans les ténèbres de ce coupe-gorge mal éclairé. Mais Andrew n’avait pas peur, il avait trop bu pour s’inquiéter de ce genre de menaces sur sa personne. Qu’est-ce qu’il pourrait bien lui arriver ?
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MessageSujet: Re: harmonie du soir • andrew   harmonie du soir • andrew EmptyJeu 11 Juil - 10:45

andrew & ambroise
harmonie du soir


La silhouette collée contre lui est une toile d'émotions, de toute évidence. Rire, déception, indifférence sont autant de pages qu'Ambroise lit sur les traits délicats. Reniflement qui attrape les effluves de quelqu'alcool fort. Interrogations qui ne trouvent aucune réponse. L'esprit doit être gourd chez le brun tout excité. Ambroise n'en était pas au premier adolescent ivre. Beaucoup cherchaient l'oubli dans le vice liquide. Il servait simplement d'appui, il était là. C'était son devoir, sa mission autant qu'un plaisir que de voir que l'on pouvait compter sur lui. Cela ne balayait pas l'absolue confiance qu'il portait en le jeune homme. Ce n'était même pas une erreur. Il en avait fait, des erreurs, Ambroise, et elles avaient un goût de cendres que cette soirée arrosée ne devait pas avoir. « Je t'en prie, c'est normal, tu n'as pas à te faire pardonner voyons » fait-il d'un ton faussement grondeur, en soufflant sur une mèche volage qui étreint ses cils. Ils titubent, silhouettes esseulées dans la masse mortelle. Ombres nocturnes, grisés d'ivresses différentes. La culpabilité au corps de prendre cette euphorie pour lui. Est-ce si mal que cela, d'apprécier autant une compagnie désirée ?

Le mutant aux cheveux d'ébène s'exclame soudain sur un raccourci. Le voilà qui, fauve sans laisse, tire un bras avec enthousiaste, traînant un Ambroise entre inquiétude et amusement. Le quadragénaire blond essayait de ne pas prêter attention à sa main frôlant le manteau du cadet à l'exaltation spiritueuse. « Doucement, doucement » rit-il, réjouis de contempler Andrew avec cette vigueur qui lui est familière. Les ombres les engloutissent. Ambroise n'a jamais eu peur du noir, mais les grandes villes ne sont pas le paradis perdu. Pour deux mutants, pour deux êtres comme eux, différents, dissemblables du monde, discordant dans la tonalité ordinaire, toute ruelle sombre est un passage vers l'enfer. « C'est encore loin ? » murmure t-il, rattrapant Andrew d'un pas forcé, rapide, abrupt. La ruelle abrite d'autres couples, d'autres groupes. Ils ont des allures de fauves aux appétits tranchants. Leurs regards jaugent, jugent, s'amusent. Quolibets à nouveau, sur la proximité de deux hommes, sur un père et son fils, ordures verbales qui s'élancent dans la nuit, les rires qui fusent, gras, grossiers. « C'est par là ? » questionne t-il, sa main pressant à présent le bras d'Andrew. Le détourner de ces roquets aux babines injurieuses devient vital. Les prunelles bleues cherchent les billes sombres aux longs cils. Les lumières chiches, voilées, transforment la tournure du visage connu. A la fois plus princier, plus lointain. A moins que l'alcool ne dénature ses traits. « Ils ne sont rien pour nous » murmure t-il encore. Citadelle de son corps, qu'il place devant Andrew, comme une muraille contre eux, contre lui. Qui protège t-il de qui, exactement ?

L'envie, le titillement que d'utiliser ce don, comme une mère bercerait un enfant querelleur. Et Andrew ? N'a t-il envie, soudain, de posséder quiconque viendrait déformer son monde, briser ses rêves ? Cette ville n'est pas pour lui. Ambroise a l'inquiétude qui flambe, qui calcine son pauvre coeur vieilli, terni. Pourquoi Andrew ne voulait pas venir à l'institut ? Leur proximité n'en serait que renforcée. Il pourrait l'aider, le vieux lion, il pourrait être là, sous la main du brun quand il en aurait besoin. Désirs contradictoires, pulsions miséreuses. Qu'espère au fond le blond ? Il fouille son esprit pour y mettre de l'ordre, entrechoque les pierres de la raison. Ce n'est nullement l'endroit pour de telles philosophies. Ils doivent se dépêcher de rentrer ; la nuit est noire et pleine de terreurs.

« Cessez ! » crie t-il, un brusque éclat dans la nuit. Les étoiles scintillent dans le silence qui suit. Les intonations furieuses qui ont éclatées face aux moqueries cruelles. Qu'importe aux yeux des autres ce qu'ils peuvent partager ? Mais le monde est ainsi. Juger, bafouer, ridiculiser quiconque n'est pas soi est une mentalité qui perdure. Non, ils ne sont pas des fauves grondant leurs boufonneries. Ils sont des coqs, leur virilité assurée aux bras de donzelles aux sourires vitreux. Une main se serre contre les doigts d'Andrew, le tire dans une direction. Peu importe où. Partir loin de cette ruelle aux immondices aux multiples aspects. Il tire, doucement, enfant ou père, éperdu de colère et d'angoisse. Il ne veut qu'une chose. Se retrouver seul avec Andrew sur un territoire qu'ils connaissent, qu'ils contrôlent.
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MessageSujet: Re: harmonie du soir • andrew   harmonie du soir • andrew EmptySam 13 Juil - 16:34

HARMONIE DU SOIR  


Dans la ruelle, c’était comme si le monde s’était éteint. La lumière des lampadaires filtrait à peine entre les immeubles, et la Lune semblait déjà s’être rendormie. Ici, la crasse régnait. Le sol était sale, collait presque aux semelles et résonnait du bruit du verre brisé. Parfois un pied inattentif frappait une canette jusque-là invisible, l’envoyant ricocher sur le sol quelques mètres plus loin. L’obscurité était un épais manteau qui dissimulait tout ce qui vivait ici, vivant ou non. On ne voyait que la sortie, la fin de ce petit passage en Enfer, la rue éclairée au loin comme destination.
Tant qu’ils ne s’arrêtaient pas, ce serait comme si les insultes qu’on leur lançait n’avaient jamais été proférées. Andrew avait l’habitude d’être interpellé, interrompu, décrié, ouvertement critiqué, rabaissé, sous-estimé, et il avait la tête ailleurs. Ses méninges encrassées restaient occupées par les préoccupations qui l'avaient aveuglé toute la soirée.
Pour Ambroise, baisser la tête face aux menaces et aux insultes n’était peut-être pas aussi simple. Grande muraille de chair et de courage qui s’interposa devant Andrew, en espérant que cela ferait peur aux chats sauvages et rats d’égouts. Un ordre qu’il leur crie, une demande de silence qui tombe dans l’oreille d’un sourd. Et sa main se serre sur celle du cadet aux yeux embrumés, à l’attitude presque végétative.

Et Ambroise qui le tirait par la main, accélérant le pas jusqu’à la sortie de ce court passage dans les entrailles du monde. Dans la rue, la vraie, les lampadaires étaient presque éblouissants. En un instant, l’air était aussi pur que le permettait la ville, et les deux hommes étaient hors de dangers (semblait-il).
« Viens, c’est par-là » recommençait Andrew, comme s’il ne s’était rien passé, comme s’ils n’avaient rien risqué en empruntant ce raccourci. Il n’avait qu’une hâte, c’était de rentrer chez lui, que toute cette soirée s’arrête pour pouvoir se racheter au plus vite auprès d'Ambroise. Ses pupilles ne fixaient que le vide, son regard était vague mais sa tête baissée comme s’il surveillait ses pas, pour éviter de trébucher sur ses propres chaussures. Andrew ne disait plus grand-chose, il n’était pas d’humeur bavarde. Parfois il pouvait l’être souvent il voulait rester la personne amicale, bienveillante qu’il aspirait à devenir, mais pas ce soir. Plus maintenant. Désolé Ambroise.
Quand après de longues minutes, les deux hommes arrivèrent enfin devant son immeuble, puis devant la porte de son appartement. Les escaliers avaient été une épreuve supplémentaire. Andrew plongea la main dans la poche de son pantalon et en extirpa son jeu de clés non sans mal. Sur les multiples anneaux du trousseau, nombre et nombre de clés. Tantôt de son appartement, de sa boîte aux lettres, de son antivol, de la réserve de la cantine pour mutant à laquelle il travaillait, de la boîte aux lettres de l’association pro-mutant qu’il aidait aussi, et ainsi de suite… Andrew pris la main d’Ambroise et y fourra l’amas de métal cliquetant. Un « Désolé » peu cérémonieux, et les pupilles d’Andrew s’effacèrent. Il n’était plus là, il était en face, il se voyait comme Ambroise le voyait. Petit, brun à la barbe naissante, dans ce monde qui paraissait toujours tellement plus lumineux à travers des pupilles bleues, un corps inhabité qui titubait et qu’Ambroise cala contre le mur, le temps de retrouver la bonne clé dans le trousseau fraîchement acquis.
Il n’était pas à sa place. Il n’était plus Andrew, mais il ne serait jamais Ambroise. Comme dans une chaussure au fond de laquelle il reste un caillou, on n’était jamais véritablement à l’aise dans un corps qui appartenait à quelqu'un d’autre.
Les mains d’Ambroise étaient bien plus agiles que celles d’Andrew ce soir-là, et son cerveau était libre du poison que s’était infligé le jeune homme. Enfin, pendant le temps qu’il s’autoriserait dans les entrailles de son père, il pouvait penser clairement. Mais il ne s’éterniserait pas, parce qu’il n’aimait pas être de trop. « Désolé Ambroise, vraiment désolé, c’est plus simple de faire comme ça, sinon j’arriverai jamais à ouvrir ma porte, j'ai trop de clés dans mon trousseau » pensait-il, pour calmer ce qu’il restait d’Ambroise dans ce corps grand et puissant, mais trop petit pour eux deux.

Une fois les multiples serrures tournées et la porte ouverte, Andrew abandonna ce vaisseau charnel et retourna s’enfoncer dans son cerveau empoisonné, ralenti et flou, traînant avec son esprit le souvenir de s’être vu ivre, lamentable et incapable à travers les yeux de celui dont l’avis l’inquiétait tant. « Désolé de t’infliger ma compagnie dans un état pareil » pensa-t-il à nouveau, oubliant alors qu’il était de nouveau seul dans son corps, laissant les rouages de son esprit s’enliser peu à peu dans l’alcool qui coulait dans ses veines.

Andrew rentra chez lui. Pour une fois, tout était rangé. Il avait attendu du monde, ce soir, il avait prévu de s’abandonner en échange d’une ou deux preuves d’affections, mais finalement rien ne s’était passé comme prévu. Le jeune homme, fatigué et perdu dans l’impression que le monde tanguait autour de lui, se laissa lourdement tomber dans le canapé. Mais il était rassuré. Il n’était pas rentré seul, il était avec Ambroise. Il ne serait jamais seul tant qu’Ambroise était là. Il le savait, maintenant.

C’était dans les songes de l’un de ces rats d’égouts, de ces voix dans la ruelle, qu’il s’en était rendu compte. Quand on esprit avait perdu prise et qu’il s’était envolé pour atterrir dans une de ces gorges blasphématoires de la ruelle. Il s’était observé, silencieux d’un coup tandis qu’il étouffait l’esprit qu’il avait chassé des commandes de son propre corps. Il s’était regardé, Andrew et Ambroise main dans la main qui traversaient ce territoire. Ce corps n’avait pas été plus sain que celui qu’Andrew venait de quitter, et son cerveau ravagé par des années et des années d’autodestruction. Ce qu’y voyait l’esprit qui s’y était invité était flou, tordu, étrange, hideux, mais c’était Andrew et Ambroise, avec la persuasion, rage corporelle à laquelle Andrew n'échappait pas, que deux hommes ne devraient pas se tenir par la main, qu’ils n’avaient rien à faire ensemble.
Et c’était cette idée qu’Andrew avait tiré de ce voyage hors de ses songes. Il n’était pas seul parce qu’il était avec Ambroise. Il ne devait pas perdre Ambroise, il ne serait rien sans Ambroise.
« Fait comme chez toi, tu connais l’appartement de toute façon » commençait-il. « Je te laisse le lit. Les draps sont propres, je les ai changés avant de partir, j’étais censé recevoir, ce soir… »
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MessageSujet: Re: harmonie du soir • andrew   harmonie du soir • andrew EmptySam 13 Juil - 18:42

andrew & ambroise
harmonie du soir


La nuit s'est toujours révélée une cage à fauves. Ils n'auraient jamais dû errer dans cet écho du monde, cet espace faufilé aux dépends de l'humanité. Ambroise se laisse mener, docilement, acceptant le silence comme il est. Compréhension aux mots tus. C'est que la colère flambe encore, étincelle de justice dans ce coeur trop vieux pour ces émotions flamboyantes. Déchets humains qui lui font se sentir, parfois, d'une autre époque. D'une autre génération. Ancêtre aux rides pourtant légères, le coeur creux qui se dévoile nostalgique. Mais tous ne sont pas des monstres sous apparat humain. Andrew est sûrement plus humain qu'eux tous, le rire aux lippes, cruels dans leurs moqueries indifférentes. Si ils avaient jappés pour une simple proximité, qu'auraient-ils hurlé à la lune, pour leurs gènes mutants ? La familiarité des lieux apaise ses braises colériques. Ses sourcils se froncent un instant, réalisant qu'Andrew semble aussi agile qu'une poule sous prozac. Il hésite à les lui retirer de ses doigts gourds, ces clés qui cliquettent, jusqu'à ce qu'il s'excuse, soudainement.

La compréhension se fait.
Mais trop tard.
Ce serait comme conduire une voiture, qui soudain devient autonome. Voir bouger son corps sans contrôler quoi que ce soit avait quelque chose de grisant et d'effrayant. Il sentait un coeur battre, au loin, tandis que les clés étaient repérées, calmement ; le corps d'Andrew était contre le mur, calme, inconscient. Sans âme. Un corps pouvait donc véritablement contenir deux entités. C'était étrange. Comme une ivresse psychique. Et les mots qui éclosent, au-delà de ses émotions propres qui se heutent à d'autres, des phrases qui naissent. Masculines, désolées, puissantes, tellement fortes qu'elles semblaient prêtes à l'écraser, mais délicates. Une main qui le contient, qui le protège du néant, jusqu'au moment où il retrouvera son corps.

La perte soudaine d'Andrew dans son corps donne lieu à une confusion. La main se serre convulsivement, réflexe physique pour vérifier s'il a de nouveau le contrôle. Sensation de puissance, à présent qu'il est à nouveau lui. Qu'a pu sentir Andrew, dans son vieux corps ? A t-il senti ses émotions ? A t-il pu traverser son corps, interne machinerie qui vieillit ? Il y a un instant honteux, à l'idée qu'il ait ressenti les vagues douleurs d'un dos tendu, les articulations parfois gonflées, la quarantaine qui ronge tout, un pas de plus vers la mort. Ils entrent, et c'est un soulagement de se détourner de cette torture qu'il s'inflige.

Le blond s'affaise dans un coin confortable de canapé, soupirant d'un souffle qu'exhale le poitrail puissant. Il allait dire quelque chose, car c'était la première fois qu'Andrew usait de son don sur lui. Il avait toujours été curieux, Ambroise, à deux doigts de le lui proposer sans jamais oser. C'est que partager un corps, c'était intime. Etrangement intime. Mais qu'il ne le lui ai pas demandé titillait quelque chose. Il n'était pas en colère, pas vraiment, il avait juste été surpris, tout en comprenant la justesse, la logique de cet effet. Même s'il aurait pu l'ouvrir, cette satané porte, en restant lui-même. Secouant la tête, il tique sur des mots. Réflexion qui dépasse les lippes, qui fend l'air. « Tu attendais quelqu'un ? »

Effectivement, l'endroit est rangé. Andrew n'est pas aussi ordonné. L'appartement lui semble changé, étrange. Il secoue encore la tête, ressentant peut-être par procuration la fatigue qui doit régner sur le corps d'Andrew, à présent. « Je peux rentrer chez moi, si tu comptes recevoir. » Naïf quadragénaire. Ses pensées s'ordonnent enfin, mais peut-être une pointe de cruauté curieuse garde les mots en lui. Andrew comptait-il ramener une conquête, ce soir ? Un instant, il est déçu pour Solveig. C'est qu'il espérait, quelque part, qu'Andrew et elle se rencontrent, s'entendent, voire se fréquentent. Mais il n'a pas à juger - Andrew fait ce qu'il veux. Majorité qui s'éprend de liberté. Mais il ne dit rien, parce qu'il a envie d'entendre ce qu'il voulait exprimer. A dire vrai, il se sent exténué. Il n'a nulle envie de partir.

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MessageSujet: Re: harmonie du soir • andrew   harmonie du soir • andrew EmptySam 13 Juil - 22:35

HARMONIE DU SOIR  


Son esprit tournait trop vite pour son cerveau encrassé. Sa vision était trouble, le monde tanguait, il voyait et ne regardait pas, c’était comme s’il était aveugle. Ses sens étaient à la fois muets et assourdissants, il ne savait que faire de ses mains, qui se vrillaient sur ses genoux. Et pourtant il essayait d’être attentif, autant que faire se pouvait, mais Andrew était bien incapable ce soir. Vautré dans son canapé, il fut vite rejoint par Ambroise qui avait l’air aussi perdu que lui.
« Non non non reste ! Tu peux rester si tu veux. Personne ne vient ce soir. Normalement ouais, mais en fait non. Personne ce soir. Du coup tu peux rester. Prend le lit, si t’as déjà mal au dos… »
Un léger silence s’installait, et les rouages malades de l’esprit d’Andrew étaient trop lents. Ce soir, sa langue prenait les devant.
« J’étais censé avoir quelqu’un, ce soir, on se retrouvait au bar, pas le même que celui de tout à l’heure, un autre. Un bar à bières un peu bobo, trop cher pour moi mais bon. J’avais même mis ma chemise, t’as vu ? Et du coup ouais, le ménage, profites-en tu verras peut-être jamais mon appartement aussi propre ! »
Andrew s’arrêta un instant pour pouffer de l’état de son propre appartement. Qu’est-ce qu’il lui avait pris de se mettre dans des états pareils rien que pour une soirée ? C’était l’espoir. Il n’y avait rien de plus terrible que l’espoir.
« Du coup on était dans ce bar, et ça commençait bien ! Et ce gars, là, Jack… » Encore une pause, courte, un moment d’hésitation à la réalisation que ce qu’il racontait, il n’avait jamais osé en parler à Ambroise. Peur de le faire fuir, peur de lui faire peur, peur de baisser dans son estime. Mais son esprit était volage, dissout, et le mal était fait. « Avec Jack c’était pas la première fois qu’on se voyait mais les fois d’avant on parlait pas. On se parlait jamais vraiment. On avait fait tout le reste, mais on s’était rien vraiment dit de plus parce qu’on était pas là pour parler. Je sais pas si c’était parce qu’on avait rien à se dire ou parce qu’il avait pas envie de plus que ce qu’on faisait, donc j’osais pas trop. Et y’a… quatre jours ? Ouais quatre jours, lundi, il m’a proposé qu’on boive un verre. Du coup j’ai mis les petits plats dans les grands ! »
De sa délicatesse ivre, il tire sur le pan de sa chemise pour essayer de la défroisser, parce qu’il s’était fait beau ce soir-là. Un coup d’œil à sa cuisine reluisante non loin d’ici, un rictus teinté d’amusement et de honte. Il n’y avait rien de plus terrible que l’espoir, qui nous faisait croire que tout était possible, que l’on avait une chance. Et il ne fallait rarement plus qu’une lueur dans la plus sombre des prisons pour que l’on risque tout. Et tout cela pour quoi ?
« Ce gars, Jack c’est un dix, un vrai, un dix sur dix ! Je suis quoi moi… Un six, allez un sept si je fais boire les gens. Mais lui il est grand il est beau, blond avec des supers yeux bleus, il pourrait avoir n’importe qui, vraiment tout le monde, et c’était tombé sur moi. Ça arrive jamais, ça, du coup j’ai voulu faire les choses bien. Et il avait l’air gentil, pas comme les autres connards qui sont juste là pour prendre leur pied et se barrer. C’était ça le plus bizarre en fait. C’était que même quand on se croisait juste pour ça, que je dormais chez lui mais qu’on parlait à peine, bah ça se sentait qu’il était attentionné et qu'au fond c'était quelqu'un de bien. C’était vraiment bizarre que ça en reste là pendant les fois où on s’est vus. »
Esprit qui divague, qui se perd dans des détails, les détours d’une histoire qui n’aura finalement pas duré mais qui reste, qui se languit dans des remords, des regrets et la culpabilité d’y avoir cru. Regard perdu qui fixe le mur en face de lui, car dans le besoin de se confier, il y a la honte de tout avouer. Et c’est tellement plus facile de s’ouvrir face à un mur que face à quelqu’un d’autre.
« Au début ça se passait bien, et quand il m’a demandé ce que je faisais je lui ai dit que j’étais livreur à vélo, et j’ai vu dans ses yeux que ça ne lui allait pas. J’ai vu son regard changer. Avant il était intéressé, et d’une seconde à l’autre il me prenait de haut. Ça se sent les trucs comme ça. Mais vraiment en une seconde. Et quand je lui ai dit les mutants, les associations, la soupe populaire, il s’en fichait, ça a pas aidé du tout, il aime pas du tout les mutants et pour lui on a pas besoin d'aide, et il me regardait de haut. Et ça fait mal, c’est putain de blessant, alors évidemment comme un con je me suis vexé parce qu’on avait déjà un peu bu, et c’est parti en engueulade. »
Andrew marque une pause, le temps que le train des injures sorte du tunnel de ses pensées. Vite, le besoin de passer à autre chose, de faire une blague pour faire croire que ça ne l’aura pas affecté.
« Mais bon, au moins c’est lui qu’à payé ! Haha ! … Enfin je lui ai fait payer… C’est pas bien de faire ça, techniquement c’est du vol, je l’ai fait payer sans lui demander son avis, je l’ai senti se débattre quand je posais sa carte bleue sur le truc, là, pour payer en sans-contact, parce que je connais pas son code j’aurai pas pu le faire faire son code, mais je l’ai forcé à payer et à partir parce qu’on s’était déjà tout dit, en fait, et quand je lui ai rendu son corps il était furieux, il est revenu dans le bar et il a fini par se faire virer. J’ai attendu un peu et je suis allé dans un autre bar, beaucoup moins cher, parce que j’avais trop honte de rentrer tout seul dans mon appartement tout propre. »

Pourquoi s’ouvrait-il ainsi ? Pourquoi ressentait-il le besoin de tout raconter ? Qu’allait en penser Ambroise ? Andrew n’osait pas le regarder, il ne voulait pas. Andrew qui admirait son père de substitution, qui voulait être comme lui, grand et fort et imperturbable, toujours là où il faut quand il faut. Comment pouvait-il espérer être comme lui s’il ne suffisait que d’un rendez-vous qui tourne mal pour finir dans des états pareils ? Encore une fois, il était question d’espoirs mal placés.

« Du coup ouais j’attendais quelqu’un, et en fait non… Du coup tu peux rester si tu veux. » Encore une pause, plus longue, le temps que ses méninges se débloquent. Andrew tourne la tête, il plante son regard dans celui d’Ambroise. « Reste, s’il te plaît. Je veux pas rester seul j’ai pas envie d’être seul, pas ce soir, prend le lit parce que je sais que tu t'es fait mal en me portant, je le sais, » et il détourne à nouveau le regard, qui s’accroche à ses deux mains posées sur ses genoux. « Je me sens tellement nul de finir dans des états pareils tout ça à cause d’un connard, mais j’y ai cru, j’ai vraiment cru que j’avais une chance et que ce serait bien, et qu’il y aurait plus que ça, et j’avais envie de croire que je valais le coup, et qu’il y avait quelque chose chez moi qui avait de la valeur, et en fait même pas. Rien du tout, et je veux pas finir seul, mais j’ai tellement l’impression d’avoir personne depuis que je suis arrivé à New York. J'essaie de me trouver des raisons d'être important pour les gens, mais c'est pas pareil, ça marche pas pareil. »
Comment pourrait-on l’aimer et avoir confiance en lui s’il était aussi minable ?
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MessageSujet: Re: harmonie du soir • andrew   harmonie du soir • andrew EmptySam 13 Juil - 23:52

andrew & ambroise
harmonie du soir


Ambroise ne disait rien. Bêtise crasse que la sienne, ignorance complète, il s'immobilisait, statue de glace et de compréhension. Le torrent des mots, confus, brouillon d'Andrew était une cascade à la douleur quasi physique. Le blond ne compta plus ses étincelles d'étonnement. Bien entendu qu'Andrew avait senti les prémices d'un dos tendu. Bien entendu qu'il était jeune, fringuant, pétillant, capable de compagnie, capable d'en chercher, d'en trouve ; était-il si vieux pour avoir oublié ce qu'était qu'être jeune ?! Mais il se sentit soudain empoigné au coeur au nom détoné. Jack. Explosion au visage. Tout avait été là, de ses allusions à Solveig repoussées gentimment, à ... tout. Comment avait-il pu passer à côté ? Ignare. Il avait été un mutant, il avait été prit aux affres de l'indécision. Il n'était pas facile de se découvrir à aimer les deux sexes, l'entité plutôt que le contenant. Un esprit plutôt qu'un corps. Il aurait dû le sentir, et c'est transi de culpabilité qu'il écoutait cette douce torture. Jack.

Il ne jugeait pas. Non, il ne se serait jamais permis. Il compatissait, même, pour avoir connu des dévoires amoureux, masculins ou féminins. Le myocarde rongé du venin du savoir ; les questions tues balayées. La joie d'Andrew était factice, l'alcool était-il le seul à l'emporter dans cette débauche de vérités ? Le flot ne tarissait pas ; oreiles traîtresses qui se repaissent de toutes ces évidences. Authenticité dans le timbe grave du brun. Il pouvait buter sur la prononciation, mais l'ouïe perfide du blond y percevait la fluidité d'émotions trop retenues, de faits trop souvent ressassés. Ils sont deux à fixer devant soi un néant où ils se camouflent, durant ce temps perdu, cet instant volé de confidences si intimes. L'aveu d'Andrew laisse un goût de cendre aux papilles du quadragénaire. Qu'on l'ai ainsi rabaissé enflamme à nouveau son être. Une envie pressante de violence se fait - un désir si souvent délaissé, depuis des années, et qui s'éveille, dragon lancinant assoifé du sang d'un Jack trop hautain pour son propre bien. Comment osait-il prendre de haut Andrew ?! Le nez se fronce, les lippes s'abaissent, il ne dit rien, le souffle court, le poitrail enserré dans l'étau du maëlstrom de sensations. Agitation interne, tempête qui souffle bien trop fort. Il se tait toujours, de peur d'envoyer des mots comme des coups. Cela ne sert à rien d'insulter cet homme. L'idée fébrile, fragile, lui vient qu'il aurait pu être cet homme, il y a vingt ans. Il aurait pu, ne sachant qu'il était un mutant, être aussi crétin. Mais il n'était pas Jack. Il était là, à éponger les paroles d'Andrew avec une illégitimité au coeur. Qui condamnera les bourreaux ? Qui garde les gardes ? Ses propres pensées battent la campagne, sous les coups de boutoir de la réalité.

Le blond inspire, une fois, deux. La respiration semble saccadée, altérée. La supplication d'Andrew n'a nulle besoin d'être ; il serait un monstre que de le laisser. Il a, en cet instant, la terrible convoitise de le prendre dans ses bras. De le réconforter pour ces actes dont il a été victime. Parce qu'il n'était que lui. Apparence enfantine, qui touche, ronge le myocarde palpitant, ces grands yeux bruns plein d'une souffrance qu'Ambroise n'a su détecter avant qu'on la lui abandonne sous le museau. Il n'en peut plus - Ambroise laisse finir les mots, les laisse tomber, les piétine d'un grognement en se levant d'un bond. Oubliées, ses propres douleurs. A t-il négligé qu'il n'était le seul à souffrir de ce monde ? Il s'avance. Deux pas, deux enjambées, un monde entier à escalader pour arriver face à Andrew ; une main, presque brutale, qui le force d'un mouvement à le regarder, les deux regards qui se heurtent, le bleu farouche, l'azur enflammé, céruléenne sauvagerie alors que ses lippes explosent d'une locution bornée.

« Je t'interdis de dire de telles ânneries. Je ne peux entrer dans cette tête de mule, » il tapote le front du brun d'un index rageur, « et te faire oublier ce genre de choses. Alors je vais me baser sur la confiance mutuelle que l'on se porte, et espérer que tu crois ce que je vais te dire. » Il n'inspire pas, il ne souffle pas, la voix hachurée, émotions vitales dans la mélopée fébrile, parce qu'il veut le protéger de tout, et avant tout de lui-même, de cette ivresse qui l'enfonce dans des terres qu'il ne peut atteindre. « Tu mérites tout ce qu'il y a de mieux. Ce sont des paroles mâchées par bien des bouches, mais elles sont véridiques. Tout d'abord, laisse moi dire que Jack est un connard. Un sombre con qui n'a pas vu la chance qui se profilait. Tu n'as aucune honte à avoir d'aucune chose en toi. Ta mutation fait partie de toi, comme n'importe quel don. A t-on le droit d'abîmer ceux qui ont cette capacité formidable à chanter juste et bien ? Ce garçon n'avait aucun droit de te faire du mal comme il l'a fait. Je ne puis dire combien je suis fier de toi, de tout les efforts que tu fais. Ce n'était juste pas le bon - et si je le croise, si un jour il a ce malheur ... » et la diction qui s'arrête une seconde, dans une tonalité menaçante ; il n'ajoute pas ce qu'il fera, car ses propres pensées l'effraient par leur brutalité. Le coup de l'émotion.

« Je sais que je ne suis pas assez là. Mon travail à l'institut me prend beaucoup de temps - mais je suis là, à n'importe quelle heure, n'importe quand. Tu sais que tu peux faire appel à moi, comme tu as su le faire ce soir. » Hésitation contrariée, et il prend à nouveau la main, abandonne le menton, l'épaule, le contact trop proche, trop ... trop. « Je ne sais si c'est l'abondance de l'alcool ingurgité qui t'enfonce dans les affres de la mélancolie, mais je sais que tu es fort. Plus fort que cela. Parce que tu es mon ami. » Mon fils, aurait-il pu ajouter, un enfant de coeur, adoption involontaire, mais ils ne viennent pas, trop hypocrites en cet instant, sans qu'il sache déterminer en quoi. Peut-être n'a t-il plus tout à fait droit à son rôle de père, d'aileurs. Les doigts qui serrent ceux du brun, s'entremêlent une seconde, s'éloignent docilement. « Tu n'aurais pas dû user de ton don, mais je vais oublier ce que tu m'as dis. Ce sera bien mieux. Tout comme j'espère que tu l'auras effacé de ta mémoire, demain. Qu'importe. Nous faisons tous des erreurs, moi le premier » soupire t-il, incapable de toutes se les rappeller, trop nombreuses, trop douloureuses. « Je suis si stupidement heureux que tu te sois confié ainsi à moi. » Il avoue, à demi-mot, les yeux baissés sur le sol, sur leurs pieds. Est-ce qu'un adulte responsable admettrait une telle coupable émotion ? Il n'en sait rien, et la perdition qui l'a frôlé durant les aveux l'achève là, le laissant pantelant, pensif, décontenancé.


Un coeur tendre, qui hait le néant vaste et noir,
Du passé lumineux recueille tout vestige!
Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige...
Ton souvenir en moi luit comme un ostensoir ! . 
Pando
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MessageSujet: Re: harmonie du soir • andrew   harmonie du soir • andrew EmptyVen 19 Juil - 0:31

HARMONIE DU SOIR  


Pour quelqu’un dont le don offrait le contrôle de tous les corps que pouvait offrir ce monde, ce qu’il faisait du sien était une bien triste chose. Il n’osait plus bouger tandis que les paroles coulaient d’entre les lèvres d’Ambroise. Torrent de sucre, d’épices et de plein de bonnes choses, paroles douces et pleines de bon sens qui laissaient pantois tant elles avaient besoin d’être entendues. Mais elles avaient mis si longtemps à venir.
Quand était la dernière fois que l’on avait essayé de faire comprendre à Andrew qu’il valait la peine d’exister ? Qu’il pourrait avoir la vie qu’il désirait s’il s’en donnait les moyens, qu’il était important, que le monde était meilleur tant qu’il en faisait partie ? Qui restait-il dans ce monde pour le lui dire ? Ses parents ne lui adressaient plus la parole depuis qu’il était arrivé à New York, même pour l’inviter pour les fêtes de fin d’année. « On ne t’en veut pas, mais on ne peut pas accepter tes choix de vie » lui avaient-ils répété. Mais quels choix avait-il eu ? Vivre sa vie sous couverture, ou s’accepter tel qu’il était ? Partir et se trouver une place dans le monde, ou rester là où il ne rentrait pas dans le moule ? Se plier à la volonté de Dieu ou essayer de vivre parmi les hommes ? La vie ou la mort ? Le choix avait été vite fait.
Et à New York il avait dû se trouver une nouvelle famille, une famille adoptive, des substituants pour le soutenir, lui répéter ce que sa famille était censée lui avoir appris, que sa vie était un don et non un fardeau, mais ne l’avait pas fait. Et c’était dur, beaucoup plus que ce qu’il pensait. Il avait cru pouvoir s’en affranchir, aussi, mais de toute évidence ce n’était pas possible.

Ambroise terminait sa tirade, et Andrew avait écouté, il s’était imprégné de ses paroles. Parfois elles lui avaient arraché un sourire, parfois un soupir, souvent un peu de mélancolie, mais elles lui avaient aussi donné de l’espoir. Cet espoir qui fait peur dans une prison à ciel ouvert, qui laisse croire que la voute céleste nous appartient seulement pour nous rire au nez quand on se brise l’échine à essayer de l’atteindre. L’espoir qui nous motive, la seule réelle énergie que connaît ce monde bâti sur des promesses que l’on se fait à soi-même.
Andrew n’osait plus faire confiance à ses espoirs, il n’osait plus espérer qu’ils ne le tromperaient pas une fois de plus. A l’inverse de ceux qui n’ont pas peur de la peur elle-même, il arrivait à Andrew de ne plus croire en ce qui devait lui éclairer ses journées. Et pourtant Ambroise était là pour le rassurer.

Andrew n’avait fait que fixer ses pieds à partir du moment où Ambroise avait lâché son menton, parce que regarder quelqu’un dans les yeux, dans les perles d’azur qui plantaient son âme dans le monde, c’était ancrer le poids de sa présence avec Andrew ce soir-là, et Andrew n’aimait pas l’intimité, il n’aimait pas s’ouvrir, être vulnérable. Mais il l’était, tout le monde l’était et ce n’était pas grave, parce qu’il l’était avec la bonne personne. Il ouvrait les bras et serrait Ambroise près de lui. Ambroise qui était debout alors qu’Andrew était assis. C’était peut-être inconfortable comme étreinte, étrange pour Ambroise, mais nécessaire. Et les méninges du cadet étaient inlassablement encrassés, ralentis et assourdis, cela ne changerait pas avant plusieurs heures.

Etau mutique qu’était Andrew ce soir, silencieux mais plein de sens, de significations. Les mots n’avaient jamais été son fort de toute façon. Mais il s’était toujours exprimé à sa manière. Il n’y avait qu’à le connaître pour toujours savoir ce qu’il faisait, ce qu’il pensait et ce qu’il voulait. Et ce soir-là, il voulait remercier Ambroise. Il n’oserait pas dire merci à voix haute, parce que sa fierté était un trop gros barrage. Lui qui voulait être grand et fort et indépendant, il avait déjà eu assez de mal à s’ouvrir comme il l’avait fait. Il voulait être Ambroise, rien que pouvoir rendre ce qu’Ambroise lui avait offert ce soir. Et il savait qu’Ambroise aurait réussi à dire merci, mais Andrew n’était pas Ambroise.

« Il faut qu’on se couche. Que je me couche. Que je dorme. Ça ira mieux demain, promis, » osa enfin Andrew, pour briser le silence. Il sentait la fatigue le tirailler, parce qu’il était tard et que son corps était empoisonné. Il n’osait pas rebondir sur tout ce que lui avait dit Ambroise, il n’avait pas les mots, et il ne les trouverait probablement pas ce soir-là. Il libérait Ambroise de son étreinte et lui montrait le lit, sans se lever de son canapé. Il était prêt à se rouler en boule sous le plaid dès que la lumière serait éteinte dans l’appartement. « Fait comme chez toi. T’es chez toi. »
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